Biographie de Jacno, l'un des tout premiers punks français
Le chanteur Jacno a disparu quasiment dans l'anonymat. Pourtant, il a été l'un des pionniers du punk français. Après le succès qu'il a connu avec les Stinky Toys et Elli Medeiros dans le duo Elli et Jacno, le compositeur a tombé dans l'ombre, tout en faisant des apparitions sporadiques sous les feux de la rampe. Il s'est éteint la nuit du 5 au 6 novembre 2009 dans un hôpital parisien. Il était âgé de 52 ans. Nous vous proposons de redécouvrir Jacno, l'un des tout premiers punks français.
Jacno a contribué à poser les jalons de l'electro-pop en France, alors que ce genre n'était encore qu'à ses balbutiements. Bien malgré lui, il a grandement apporté à la modernisation de la musique française de son temps. Quoiqu'il ne s'en est jamais revendiqué, il était l'un des membres fondateurs du groupe Stinky Toys dont on dit que c’était le premier groupe à s'inscrire dans le sillage du punk à Paris. Il a poursuivi son œuvre avec le duo qu'il a formé avec Elli, puis, dans l'ombre, avec plusieurs autres chanteurs pour qui il a composé la musique et les paroles.
Présentation sommaire de Jacno
Nom de naissance | Denis Quilliard |
Pseudonymes | Jacno, Le Gaulois |
Date de naissance | 3 juillet 1957 |
Lieu de naissance | 4e arrondissement de Paris, France |
Signe astrologique | Cancer |
Décès | 6 novembre 2009 à Paris 13e |
Age à sa mort | 52 ans |
Nationalité | française |
Ethnicité | caucasien |
Activités | chanteur, musicien, compositeur, producteur |
Genre musical | rock, new wave, pop |
Années d'activité | 1976 - 2009 |
Groupes | Bloodsuckers, Stinky Toys, Elli et Jacno |
Enfant | Calypso Medeiros |
Discographie | sept albums |
Biographie de Jacno
Né Denis Quilliard à Paris en 1957, Jacno est issu d’une famille qui a des liens très forts avec la Champagne, une ancienne province française où la famille possédait une demeure de refuge.
Le jeune Denis Quillard a grandi aux cotés de ses parents, aimants et attentifs, comme son grand-père. Il a eu un lien avec l'histoire de la France par son oncle, André Zeller, que le chanteur a présenté comme un " personnage historique ". Il était un membre du " quarteron de généraux félons ", qui a fondé l'OAS, dont le Général de Gaulle a parlé. L'oncle du petit Denis est passé par la case prison avant d'être libéré par le Général.
La scolarité de Denis n'a pas été un fleuve tranquille. Jusqu’en troisième, il est allé d'un établissement à un autre, souvent exclu pour son mauvais travail ou sa conduite exécrable. Chez les Frères maristes de Notre-Dame-de-Bury, à Margency, dans le Val d’Oise, il a appris à jouer de la flûte. Bien que dégoûté par cet instrument et lassé d'apprendre le solfège, il a découvert qu'il était doué de l’oreille absolue.
Le petit Parisien a ensuite fréquenté dans plusieurs lycées de Paris où il s'est adonné à la consommation de plusieurs drogues. Exclu de chacun de ces lycées, il a été admis au lycée Rodin dans le 13e arrondissement de Paris. Il y est devenu l'ami de Pierre Meige, Éric Dongu plus connu sous le pseudonyme d'Eric Débris et d'Éric Feidt, encore appelé Rikky Darling. Pour avoir séquestré le proviseur du lycée Rodin, Jacno en a également été renvoyé.
La délinquance de Denis est allée bien au-delà des barrières des lycées qu'il a fréquentés. À 14 ans, ayant déjà travaillé comme coursier pour s'offrir une guitare, il s'est résolu à ne plus jamais travailler. Il est alors devenu un spécialiste du vol et de la revente de disques.
Avec ses copains du lycée Rodin, Denis a monté un groupe de rock nommé Bloodsuckers. Ils ont joué dans des clubs de Saint-Germain-des-Prés ou pendant les fêtes de banlieue. Au bout de seulement une année, le groupe s'est séparé.
Le pseudonyme Jacno, Denis le doit aux Gauloises dont il était un fumeur effréné depuis l’école primaire. Un de ses camarades lui avait alors attribué ce surnom en référence à Marcel Jacno, le dessinateur du casque ailé qui apparaissait sur les paquets de cette marque de cigarettes.
A la découverte du rock
C'est à travers The Who et The Rolling Stones que Denis a découvert le rock comme la plupart des jeunes de sa génération.
Il a appris à jouer la batterie et la guitare en se nourrissant des mélodies de Keith Richards et Pete Townsend dont il essayait de copier le style à la perfection. Il a ensuite formé des groupes de rock qu'il a appelé Bloodsuckers, en 1973. La même année, il a fait la rencontre d'Elli Medeiros. C'était lors d'une manifestation contre la loi Debré.
Entre la jeune Uruguayenne dont le dessein à peine voilé était de draguer les garçons avec sa mini-jupe et son blouson Alice Cooper et le jeune Denis, le courant est vite passé. C'est ainsi qu'ils ont décidé de faire de la musique ensemble.
Les choses se sont faites facilement car Jacno avait déjà travaillé avec une figure bien connue, Elodie Lauten. La musicienne avant-gardiste composait de la musique pour un public disséminé entre New York et Paris.
En 1976, avec Elli Medeiros, Jacno a fondé les Stinky Toys. On y retrouvait également Bruno Carone, fils du photographe Walter Carone, Albin Dériat, et Hervé Zénouda. Ce dernier a été batteur dans les groupes Strike Up et Loose Heart.
Le 4 juillet 1976, les Stinky Toys se sont produits sur scène pour la première fois à la Pizza du Marais. Il ont touché 60 francs chacun pour ce spectacle. Le groupe a ensuite enchainé les concerts inhabituels, notamment dans un festival à Laborde, dans un asile anti-psychiatrique fondé par Gilles Deleuze et Félix Gattari.
Le 21 septembre 1976, à l'invitation de Malcolm McLaren, le manager des Sеx Pistols, qui les avait rencontrés dans une boutique des Halles, ils ont partagé l'affiche d’un festival au 100 Club, à Londres avec The Clash, Sеx Pistols, Damned, Buzzcocks, Siouxsie & The Banshees, entre autres.
Les Stinky Toys ont ensuite été le premier groupe français à être mentionné dans Melody Maker, grâce à leur prestation au 100 Club.
En mars 1977, Le groupe est apparu comme le groupe emblématique du punk parisien à la nuit punk, au Palais des Glaces, aux côtés de Jam, Police et Generation X. Le 30 juin 77, le groupe a joué lors du mariage de Loulou de la Falaise, égérie d’Yves St Laurent, au Chalet du Lac, dans le Bois de Boulogne.
Signés chez Polydor, Les Stinky Toys ont sorti leur premier 45 tours intitulé Bozy Creed, puis un album qui s'est écoulé à 20.000 exemplaires.
Après la sortie d'un second album qui a été un fiasco, et un concert désastreux qui a laissé un spectateur sur le carreau au Palais des Arts, les Stinky Toys se sont séparés.
De Rectangle à Elli et Jacno
Après sa séparation de ses complices d'antan, Jacno a fait la rencontre de Kraftwerk, qui l'a initié aux synthétiseurs et aux machines électroniques. C'est ainsi qu'il a commencé à faire des compositions en associant son sens rythmique hérité des Stones et des sonorités de la techno. Cinq titres en sont nés en 1979. Parmi eux, quatre instrumentaux sont sortis sur un label indépendant appelé Celluloïd.
Au départ, Rectangle avait du mal à s'imposer sur les ondes. C'est ensuite grâce à Olivier Assayas que Europe 1 a adopté le titre. Assayas en avait fait la bande originale de son premier film, avec Elli, et en a tourné le clip. Ce qui s'en est suivi était plutôt inimaginable quelques mois avant. Rectangle a été numéro 1 en France et dans toute l’Europe. Nesquick l'a également adopté pour sa publicité.
A forte coloration techno pop, l'album Tout va sauter, porté par des titres comme Main dans la main et L’Age atomique, a atteint les sommets des classements en 1980.
En 1981, Lio a signé une collaboration avec Jacno, au mépris des conseils de ses proches qui voulaient la dissuader de travailler avec le compositeur, peu recommandable selon eux. La Belge qui avait déjà séduit toute l'Europe avec Banana Split a réédité l'exploit en chantant Amoureux solitaire qui s'est vendu à plusieurs millions d’exemplaires.
Planant sur des vagues de ce succès, Jacno a également travaillé sur Mythomane, le premier album d’Etienne Daho. Fan des Stinky Toys, ce chanteur a organisé un concert du groupe en 78 à Rennes, dans l'espoir de rencontrer la troupe de Jacno.
L'aventure Elli et Jacno s'est terminée après la sortie de l'album Les Nuits de la pleine Lune, bande originale du film d’Eric Rohmer. Il était précédé par Inédits 77/81, qui regroupait des lives et inédits de cette moitié de décennie et Boomerang en 1982.
Solo dans l'ombre et un passage au cinéma
Après la fin de l'aventure Elli et Jacno, le compositeur a continué de faire de la musique, tout comme Elli. Inspiré par Françoise Hardy et sa fiancée Pauline Lafont, il a écrit des chansons et composé des musiques, dans l'ombre d'autres chanteurs. Il a notamment produit Daniel Darc, l'ancien chanteur de Taxi Girl, et a travaillé sur des albums pour Mathématiques Modernes, Disco Rouge en 1981, et Tombé du ciel de Jacques Higelin en 1988.
En 1989, Jacno a enregistré son premier album solo, T'es loin t'es près, après quelques 45 tours. Il a réussi à y faire chanter son idole Françoise Hardy et Pauline Lafont. Deux ans après, il a sorti Une idée derrière la tête, dans la suite de l'album précédent.
Malgré l'accueil mitigé de cet album, les journalistes n'ont pas arrêté de braquer leurs projecteurs sur le chanteur qui leur a toujours ouvert les portes de son appartement parisien. En 1995, Etienne Daho a rendu la pareille Jacno en produisant Faux Témoin. Jacno y a interprété D'une rive à l'autre avec Romane Bohringer.
En 1998, le groupe français Les Valentins a contribué à la publication de La part des anges, un album de dix titres aux sonorités électro pop. On y a retrouvé, en chanson cachée, une reprise du Sud de Nino Ferrer. Jacno avait enregistré ce titre le jour de la disparition de celui à qui il rendait ainsi hommage.
En 1998, le public a découvert le Stade de France, les tympans caressés par OAO, l'hymne d'inauguration du joyau architectural. Les organisateur de cette inauguration ne se doutaient sans doute pas que Jacno chanterait quelques années après Le sport tue, et que ce titre s'arracherait par toutes les chaines.
En 1999, parmi la quarantaine d'artistes réunis lors d'un concert organisé au profit du GISTI, le groupe d'information et de soutien des immigrés, se trouvait en bonne place l'ancien membre du duo Elli et Jacno. En 2001, il a contribué à la réalisation de l'album Tribute to Alain Delon et Jean-Pierre Melville.
L'année d'après, French Paradoxe est sorti. Helena Noguerra y est intervenue sur le titre Désamour. Le disque a été salué par la critique. Paradoxalement, les œuvres de Jacno n'ont pas réussi à se faire une place dans les programmations des radios parisiennes.
La même année, il a fait une entrée timide au cinéma par le film L'Auberge espagnole de Cédric Klapisch. Il y a interprété le rôle du père de Xavier, le personnage principal. Ce premier rôle lui a permis d'en décrocher d'autres, notamment dans Variété Française de Frédéric Videau en 2003. Le film a été présenté à la Mostra de Venise 2003 dans le cadre de la semaine internationale de la critique.
Jacno a ensuite joué dans Les lionceaux de Claire Doyon, puis dans Code 68 de Jean-Henri Roger en 2004. Le 15 mai 2006, il a sorti Tant de temps dans lequel il a tourné en dérision les inscriptions Fumer tue qui apparaissaient sur les paquets de cigarettes. Le titre Le sport tue a été diffusé par de nombres chaines.
Jacno a définitivement quitté la scène le 6 novembre 2009, emporté par un cancer. A 52 ans, il aurait sans doute davantage apporté à la culture française.
En juin 2011, quelques musiciens et chanteurs avec lesquels il avait collaboré lui ont rendu un hommage à travers l'album Jacno future. Des grosses pointures comme Étienne Daho et Calypso Valois, la fille d'Elli et Jacno, y ont signé des titres comme Amoureux solitaires.
Discographie de Jacno
- 1979 : Jacno
- 1989 : T'es loin t'es près
- 1991 : Une idée derrière la tête
- 1995 : Faux témoin
- 1999 : La part des anges
- 2002 : French paradoxe
- 2006 : Tant de temps
Filmographie de Jacno
- 1984 : Les Nuits de la pleine lune d'Éric Rohmer (compositeur )
- 1989 : J'aurais jamais dû croiser son regard de Jean-Marc Longval ( acteur )
- 1993 : Le Contrat de Laurent Pawlotsky (compositeur )
- 1995 : Les Derniers Mots de Yannick Saillet ( acteur )
- 2002 : L'Auberge espagnole de Cédric Klapisch ( acteur )
- 2002 : Lulu de Jean-Henri Roger ( compositeur )
- 2003 : Variété française de Frédéric Videau ( compositeur )
- 2003 : Variété française de Frédéric Videau ( acteur )
- 2003 : Les Lionceaux de Claire Doyon ( acteur )
- 2004 : Code 68 de Jean-Henri Roger ( compositeur et acteur )
- 2007 : Sous les toits de Paris de Hiner Saleem ( compositeur )
- 2007 : Fille unique de Julie Bonan ( acteur )
Source: Legit.ng